Packages bancaires, des formules plutôt amères

Les banquiers font preuve de beaucoup d’imagination pour concocter leurs offres groupées, dont on n’apprécie pas toujours toutes les saveurs. Services inutiles, inadaptés ou surdimensionnés… Cela passe mal au moment de régler l’addition.

 

Pour percevoir des bonus, les conseillers des banques doivent atteindre des objectifs de vente. Résultat, il est fort possible qu’ils vous incitent à souscrire des offres groupées de services de leur établissement. Ces packages constituent les menus des banques. Facturés au forfait, ils comportent pour la plupart, en guise de plat de résistance, deux incontournables : les frais de tenue de compte et la cotisation de la carte bancaire. Mais peuvent s’y ajouter une entrée composée d’autres services moins indispensables, comme une assurance des moyens de paiement, une autorisation de découvert ou des alertes SMS sur le solde de votre compte. Et enfin un dessert, éventuellement de trop, car les packages intègrent souvent des produits plus rarement utilisés, tels des chèques de banque, l’opposition sur chèque après perte ou vol, ou la réédition du code secret de votre carte de paiement. Ainsi, vos frais bancaires groupés risquent de vous coûter à l’année plus cher que si vous aviez utilisé ponctuellement l’un ou l’autre des services inclus.

 

DES OFFRES SOUVENT SURDIMENSIONNÉES

Le journal Le Monde en apporte la preuve avec son étude de 2019 sur les tarifs bancaires, axée sur plusieurs profils types. Un client qui utilise peu les services de base (carte bancaire internationale classique, consultation du compte par téléphone, 8 retraits/mois, dont 2 hors réseau…) n’a intérêt à opter pour une offre groupée que dans 12 banques sur les 120 qui en proposent. À la Caisse d’épargne Midi-Pyrénées, le forfait Bouquet liberté lui coûtera 2 fois plus cher (108 €/an) que s’il opte pour les services facturés à l’unité (54,08 €/an). Même constat pour un couple possédant un compte joint, géré sur Internet, avec 2 cartes bancaires (à débit différé, 16 retraits/mois, dont 8 hors réseau…) : choisir le package n’est avantageux que dans 43,3 % des banques. Les “gros” utilisateurs de services bancaires (gestion sur Internet, carte Gold ou Premier, opérations de Bourse…) s’en tirent un peu mieux : l’offre groupée devient intéressante dans la moitié environ des cas. À l’aune de ce constat, nous avons voulu vous aider à déterminer si vous surpayez le package que vous détenez ou que l’on vous propose. Pour y parvenir, vous pouvez vous munir du récapitulatif annuel des frais que votre banque vous a envoyé en début d’année. Identifiez les services inclus dans le package que vous avez réellement utilisés. Votre package est surdimensionné pour vos besoins ? Vous avez la possibilité de le résilier pour ne conserver que les services indispensables. Ou d’examiner ce que proposent les banques concurrentes. Rien que sur la carte bancaire, les économies peuvent être importantes, puisque ce moyen de paiement est facturé à l’unité entre 0 et 52 €, selon les établissements ! Vous pouvez, par exemple, réduire à néant ce coût en ouvrant un compte dans une banque en ligne (Boursorama, Fortuneo, ING Direct…), où tous les services de base, carte comprise, sont gratuits. Mais à condition d’apporter un minimum de revenus ou d’épargne.

 

LES OFFRES PEUVENT DIFFICILEMENT ÊTRE COMPARÉES

En examinant la composition des packages, plusieurs évidences nous ont sauté aux yeux. D’abord, ils sont difficilement comparables, puisque chaque banque est libre d’y inclure les services qu’elle veut. Si une minorité en modère la composition, en se cantonnant à 3 ou 4 lignes comprenant au minimum les frais de tenue de compte, la carte bancaire Visa ou Mastercard internationale et l’assurance moyens de paiement, d’autres jouent la surenchère. Par exemple, chez HSBC, le package Hexagone n’en comprend pas moins de 10 ! À l’inverse du Crédit agricole Île-de- France, avec son Compte à composer Socle (4 services payants), ou du CIC, avec son Ajustable V2 (3 services payants). Le CIC est de plus la seule banque de notre panel à présenter ses offres groupées sous la forme d’un tableau qui détaille pour chaque service le prix à l’unité hors package, ce qui permet d’en jauger l’intérêt. En revanche, chez LCL, comprendre l’offre groupée relève du jeu de piste : les services inclus sont éparpillés dans les 45 pages de la brochure tarifaire et signalés seulement par un pictogramme !

 

DES TECHNIQUES ÉPROUVÉES POUR APPÂTER LE CLIENT

Pour les conseillers, le flou des brochures comme l’accumulation des services compris dans les packages ont un objectif : vous laisser croire que vous faites une bonne affaire. Calculatrice en main, ils vont même vous démontrer que les économies sont substantielles. Il est vrai que, dans certains établissements, préférer l’offre groupée à la souscription de services à l’unité fait radicalement baisser la note : jusqu’à – 20 % à La Banque postale et à la Caisse d’épargne Île-de-France ; de – 30 à – 45 % au Crédit agricole Île-de-France, chez BNP Paribas, au Crédit du Nord ou à la Société générale, et au-delà de – 60 % au Crédit agricole Sud Rhône- Alpes ou chez HSBC. Alléchant… Mais gare au miroir aux alouettes : nombre de ces services sont, au mieux, uniquement destinés à vous rassurer, au pire, carrément inutiles !

 

CHÈQUE DE BANQUE : UN SERVICE SOUVENT ACCESSOIRE

L’exemple le plus frappant est l’assurance des moyens de paiement, qui joue après le vol ou la perte de votre carte bancaire ou d’un chèque. Elle est imposée dans tous les packages analysés (sauf au Crédit agricole et à la Bred) pour 24 à 36 €/an, alors que la loi est déjà très protectrice dans la majorité des cas de fraude. Quant à l’opposition sur un chèque perdu ou volé, pas toujours couverte par l’assurance précitée, elle est intégrée à 2 offres de notre panel. Facturée 13 € pièce chez HSBC et 15,50 € au Crédit du Nord, l’économie paraît importante en optant pour leurs packages. Encore faut-il égarer ou se faire dérober un chèque pour rentrer dans ses frais… Dans la même veine, les offres groupées comprennent parfois l’émission d’un chèque de banque : un bout de papier facturé 15 € au Crédit du Nord ou 9,90 € à la BNP Paribas. Ce type de chèques est nécessaire lorsqu’on achète une automobile, un bien immobilier, etc. Des acquisitions que l’on ne fait pas tous les ans. Et pourtant, les banques en tiennent compte pour établir le tarif de leurs packages. Autre service discutable, intégré à certains packages : l’épargne automatique, autrement dit la faculté pour la banque de vous décharger du versement de vos excédents de trésorerie sur un produit d’épargne. Elle est comprise dans 2 des offres groupées étudiées et facturée hors forfait 9,50 € chez BNP Paribas, 10,80 € à la Caisse d’épargne Rhône- Alpes. Or, ce service est accessoire pour peu que vous gériez vous-même vos comptes : rien de plus simple (et gratuit) que de réaliser un versement, si l’occasion se présente, voire de mettre en place un virement automatique pour alimenter vos livrets ou votre contrat d’assurance- vie. Enfin, alors que seulement 15 % des Français ne sont pas connectés à Internet, selon l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), le Crédit du Nord fait encore payer l’accès aux espaces personnels en ligne ! Inclus dans un package, ce service revient très cher au détail : 24 € à l’année.

 

UN COFFRE-FORT NUMÉRIQUE GRATUIT… QUI COÛTE CHER

Quant à la Bred Banque Populaire, elle offre certes un accès gratuit Internet (Dispobank on line), mais elle intègre dans son package un service d’accès en ligne (BredConnect) aux prestations supérieures, facturé 39,60 € hors forfait. Un comble, alors que la gestion des comptes par les clients représente une sacrée économie pour les banques, puisque leur personnel en agences ou en centres d’appels est beaucoup moins sollicité ! Si ce service n’a pas d’incidence budgétaire avec le package Bred Acces à 60 €/an (son coût est inférieur à la simple addition des frais de tenue de compte et de la cotisation à la carte bancaire), il en a pour partie au Crédit du Nord. NorPlus coûte en effet 107,40 €/ an et présente, par ailleurs, une accumulation de services superflus : chèque de banque, frais d’opposition sur chèque, assurance des achats par Internet, etc. La Bred intègre toutefois dans son forfait 6 mois de gratuité pour stocker documents bancaires, factures ou papiers personnels dans son coffre-fort numérique. Mais il est par la suite facturé en sus du forfait 12 €/an ! Au Crédit agricole, c’est l’abonnement au magazine Dossier familial, édité par une filiale de la banque, qui est proposé dans son Compte à composer. Trois numéros (3 mois) sont offerts, mais ensuite l’abonnement devient automatiquement payant (47,60 €/ an), avec résiliation possible à tout moment.

 

AVEC UN DÉCOUVERT, LES PACKAGES GAGNENT EN INTÉRÊT

Malgré ces égarements, tout n’est pas bon à jeter dans les packages. « Ce qui est rentable pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres, raison pour laquelle on conseille aux clients de bien regarder ce dont ils ont besoin avant de souscrire », souligne Géraldine, fondatrice du site de parrainage Parrain-Boursorama.com. C’est notamment le cas pour les clients régulièrement dans le rouge.  De nombreux forfaits intègrent en effet des alertes par SMS sur le solde du compte, un découvert autorisé à taux personnalisé ou des frais d’agios plafonnés. Sur ce dernier point, les packages permettent ainsi d’échapper à une pratique bien injuste : la facturation d’un montant forfaitaire minimal d’agios. Par exemple, chez HSBC, si vos intérêts débiteurs s’élèvent à 2 € sur 1 trimestre, la banque facturera au minimum 10 €. Même principe au Crédit du Nord, mais à hauteur de 6,20 €, ou à La Banque postale pour “seulement” 1,50 € ! Dans notre panel, les offres groupées de ces 3 banques exonèrent de ce coût forfaitaire (La Banque postale) ou de montants supérieurs (8 € au Crédit du Nord, 12 € chez HSBC). La formule se révèle particulièrement intéressante pour les 18-25 ans, qui bénéficient d’un seuil de non-perception d’intérêts débiteurs (3 €/trimestre), ce qui leur permet d’utiliser sans frais le découvert 5 jours/mois à hauteur de 520 €. Pour les personnes flirtant souvent avec un découvert, ces packages gagnent donc en intérêt.

 

RISTOURNES ET TARIFS PRÉFÉRENTIELS

Parfois, il faut aussi voir au-delà des offres groupées pour y trouver votre compte en fonction de vos besoins. À la Société générale, par exemple, le package Sobrio ouvre droit à une réduction de 20 % sur des options qui peuvent être intéressantes au quotidien, comme l’exonération d’agios ou des retraits illimités sans frais aux distributeurs de billets (1,60 €/mois au lieu de 2 €). Autre stratégie à la Caisse d’épargne : opter pour le Bouquet liberté donne droit à des tarifs préférentiels sur une quinzaine de services (alertes SMS, retraits illimités aux DAB…) : – 10 % pour 1 service complémentaire, et jusqu’à – 20 % pour 3 services ou plus. Même principe avec LCL à la carte, dont la composition est libre. Il suffit de choisir une carte, puis des services additionnels (assurances, option Bourse, alertes SMS, etc.), tout en bénéficiant de ristournes dégressives, de – 3 % pour 1 produit jusqu’à – 12 % au-delà de 4, avec 10 % supplémentaires en domiciliant vos revenus dans la banque (20 % pour les moins de 30 ans). Des rabais complémentaires sont accordés dans le cadre de l’ouverture d’un compte joint (carte à tarif préférentiel à La Banque postale ou au Crédit du Nord). Selon les établissements, ils sont aussi un très bon plan pour les jeunes âgés de 25 à 30 ans, puisqu’ils sont alors facturés 2 fois moins cher.

 

ACCEPTER, NÉGOCIER… OU PASSER CHEZ LE CONCURRENT

Après avoir fait vos calculs, vous disposez de plusieurs options. Souscrivez ou conservez un package si les services qu’il contient vous sont utiles, vous coûtent le juste prix ou vous permettent de négocier des rabais, notamment sur le taux ou la durée d’un prêt à la consommation ou immobilier. En revanche, si vous constatez que vous surpayez pour tous ces services, pas d’hésitation : tentez une négociation avec votre conseiller, basculez vers un choix à l’unité ou… changez de crémerie en ouvrant un compte sur une banque en ligne !

LES FRAIS D’INCIDENT PLAFONNÉS ?

1 Français sur 4 dépasse son découvert autorisé chaque mois. Les frais d’incident rapportent aux banques 6,5 milliards d’euros par an ! Des limites ont pourtant été fixées par le législateur : les commissions d’intervention ne peuvent coûter plus de 80 €/mois (20 € pour les foyers fragilisés), et chaque chèque rejeté, pas plus de 50 €. Mais s’ajoutent les lettres d’information, chèrement facturées, et les agios… Sous la pression des associations, le gouvernement s’est engagé à plafonner ces frais dans le cadre du plan pauvreté, qui pourrait être examiné par le Parlement cet automne. Mais seulement pour les ménages fragiles.

LES OFFRES POUR LES JEUNES

Les banques traditionnelles rivalisent de “générosité” pour séduire les 18-25 ans. Une tâche ardue, car cette tranche d’âge a tendance à privilégier les applis téléchargées sur Smartphone.  Pour attirer les jeunes, une clientèle intéressante à long terme, la majorité des banques proposent des forfaits destinés aux 18-25 ans. La palette des offres est assez étoffée et va du prêt pour financer les études à l’assurance habitation, en passant par la caution bancaire. L’un de leurs principaux intérêts réside dans des tarifs particulièrement avantageux, pour des services de base proches de ceux destinés aux adultes. Les banques en ligne et les néo-banques – phénomène récent – possèdent déjà de nombreux atouts pouvant intéresser les jeunes : ouverture de compte sans conditions de ressources (donc sans salaire), mobilité grâce à des applications téléchargeables et frais faibles. Ainsi, à l’exception de Monabanq, elles n’ont pas de tarifs spécialement adaptés à cette catégorie de clients.